French Journal For Media Research

Itidel Fadhloun et Abdelkader Ben Jdira

Comment les étudiants se représentent-ils la pédagogie numérique en temps de Covid-19 ? Quels sont les effets pervers de cette forme d’apprentissage ?

Texte intégral

1Résumé
La présente étude a pour objectifs d’appréhender les représentations des étudiants de l’enseignement à distance, en période de pandémie et d’en déterminer l’impact sur leurs attitudes et préférences, entre présentiel et distanciel. Les données de l’enquête par questionnaire ont fait ressortir des représentations négatives. Cette « pédagogie numérique » aurait même des effets pervers.
Mots-clés : représentations, attitudes, présentiel, effets pervers, pédagogie numérique
Summary
These study objectives seek for understanding student representations of e-learning while going through the pandemy and to determine their impact on their behaviors and preferences, between face-to-face and e-learning. The data from the survey revealed negative representations. This "digital pedagogy" would even have perverse effects.

Keywords : representations, behaviors, face-to-face, perverse effects, digital pedagogy

Introduction

2La pandémie de Covid-19 a imposé au monde un nouveau mode de fonctionnement, une nouvelle gestion et organisation à l’échelle tant individuelle que collective. Le système éducatif a été l’un des secteurs les plus touchés par les mesures sanitaires d’urgence prises par le gouvernement, auxquelles ni les enseignants ni les apprenants n’étaient suffisamment préparés.

3Afin d’éviter tout risque de propagation du virus, les universités françaises ont été parmi les premières institutions à fermer leurs portes durant la période de confinement, dont la première phase s’est étalée du lundi 17 mars 2020 jusqu’à la fin de l’année universitaire. L’enseignement à distance a été mis en place, sans nécessairement s’assurer au préalable de l’acquisition des outils appropriés ni de leur maitrise de la part des étudiants. Travaux dirigés et cours magistraux ont été dispensés à distance. Il en fut de même pour le « rattrapage » des modules dit « défaillants », pour certains étudiants. Les acteurs du système éducatif se sont trouvés dans l’obligation de s’adapter à ce contexte inédit, de revoir les façons de faire, de recourir à de nouvelles formes d’apprentissage à tous les niveaux et pour toutes les disciplines.

4Nul doute, le passage à la pédagogie numérique nécessite une formation des plus rigoureuses, consistant en « l’apprentissage de l’utilisation des outils numériques (ordinateur, tablette par exemple) ainsi que la maîtrise des logiciels » (Ailincai, Gabillon et Ferriere, 2018).

5Par ailleurs, le dispositif de formation hybride1 repose sur « des formes complexes de médiatisation et de médiation » (Charlier B., Deschryver N. et Peraya D., 2006)2.

6Bien que la plupart des étudiants aient acquis une certaine connaissance de l’outil numérique, il s’est produit, pendant la longue période de confinement, une certaine altération de la représentation de l’enseignement. Habitués jusque-là à l’expérience pédagogique en présentiel, bon nombre d’entre eux se trouveraient lésés à plusieurs niveaux, par cette forme digitale, dénuée de toute communication directe avec l’enseignant. Des difficultés de tous genres entraineraient leur rejet du distanciel et leur préférence pour la forme « classique » d’apprentissage…

7Selon nous, loin d’être une pédagogie, au plein sens du terme, l’usage du numérique n’est pas sans générer des difficultés, tant pour les apprenants que pour les enseignants. L’appropriation de l’outil numérique serait fortement tributaire des représentations (positives ou négatives) et de leur impact sur les attitudes et comportements des apprenants, se traduisant dans la valeur accordée à l’apprentissage en ligne. D’un autre côté, les représentations que se font les apprenants du distanciel engendrent des attitudes négatives, des comportements oscillant entre le refus et le rejet, voire parfois le déni de cette forme d’apprentissage.

8Quelles sont les représentations sociales des étudiants de la licence AES3 au CUR4 de l’enseignement à distance, de l’apprentissage en ligne au moyen de l’outil numérique ? Celui-ci peut-il constituer un véritable substitut pédagogique ? Entraine-t-il des effets néfastes pour les apprenants en freinant, entre autres, le processus de socialisation ?

9Considérant l’apprentissage comme une forme de communication interpersonnelle, d’un point de vue psychosociologique, le recours à la « pédagogie numérique », loin de constituer une alternative à la pédagogie classique, n’entrainerait-il pas des effets pervers, en ce sens qu’il limiterait, voire bloquerait toute forme de communication mettant en œuvre l’interactivité et l’interaction ?

Méthodologie

10Le recueil et, surtout, l’analyse des données relatives aux représentations sociales constituent un travail nécessitant beaucoup de « rigueur », pour reprendre l’expression de Abric (2012). Pour le recueil des représentations, il existe plusieurs outils, les plus « classiques » étant l’entretien et le questionnaire. Cet outil d’investigation, largement utilisé, en raison de son aspect pratique et standardisé, est une technique plutôt destinée à recueillir des données quantitatives. Toutefois, il est possible d'effectuer des enquêtes qualitatives par questionnaire, l’objectif étant le recueil de données relatives à l'opinion des enquêtés, aux dimensions cognitives, affectives et sociales de leur représentation…Cette technique comporte des limites, dont le choix des thèmes abordés et l’ordre des items ainsi que la formulation des questions.

11Notre outil d’investigation (le questionnaire) _ administré à un échantillon tout-venant de 100 étudiants5 en licence AES au CUR, le 20 avril 2021 via un lien numérique (Google Forms)_a été conçu de telle façon à ce qu’une bonne proportion des questions, presque la moitié (12 questions sur 26), soit formulée dans le but d’appréhender les représentations, opinions, attitudes et comportements des enquêtés en ce qui concerne l’apprentissage en ligne, (ou apprentissage au moyen de l’outil numérique). C’est ce qui nous a permis de recueillir des données assez consistantes pouvant être exploitées de multiples façons et interprétées sans ambiguïté aucune.

12Pour ce qui est du traitement des données recueillies, il s’est opéré de la façon suivante : les données quantitatives ont fait l’objet d’un traitement statistique. Quant aux données qualitatives (justification de réponses), nous en avons fait l’analyse6 et tenté de reconstituer la perception que se font les sujets de la « pédagogie numérique », d’une part et de cerner leurs attitudes et comportements à l’égard de cette forme d’apprentissage, d’autre part.

13Le présent travail comporte deux grandes parties. Dans la première partie, nous exposerons de manière succincte la théorie des représentations sociales. La seconde partie constitue le compte-rendu de notre enquête de terrain par questionnaire. Dans la restitution des résultats, nous mettrons l’accent, dans un premier temps, sur les représentations sociales de l’enseignement à distance et ce qu’elles génèrent comme opinions, attitudes et comportements. Dans un second temps, nous passerons en revue les effets « néfastes », ou ce qu’on pourrait appeler « effets pervers » de cette forme d’apprentissage.

14Dans ce qui suit, nous procédons à un état des lieux de la recherche en rapport avec notre thématique. Par la suite, nous présentons le parti-pris théorique.

Etat des lieux de la recherche sur la question

15Depuis le début du XXI -ème siècle, de nombreux chercheurs d’horizons divers (SIC7, Sciences de l’Education, notamment) se sont intéressés, aux usages des outils numériques en éducation (TIC, TICE, ENT…). Certains travaux ont porté sur les représentations sociales de ces outils, que ce soit chez les apprenants ou les enseignants et leur impact sur les attitudes, opinions et comportements des usagers.

16Les études ont porté, entre autres, sur : l’éducation au numérique (Persch et Soulairol (2019), l’ENT8 dans l'enseignement secondaire (Schneewele. M., 2016), l’utilisation des outils numériques (Rodica A., Gabillon, Z., et Ferriere, S., 2018), les TICE en contexte de pédagogie différenciée (Lescourret, M., 2019), les TIC chez des élèves du secondaire (Kouawo, A., et al. ; 2013), l’apprentissage mobile chez de futurs enseignants (Lopes Jaguaribe Pontes, R., 2017), le numérique en éducation (Couture, Hugo ; 2020) …

17Toujours en relation avec cette thématique, d’autres chercheurs se sont intéressés à des sujets relativement pointus tels que : Comment le numérique modifie la représentation de la forme scolaire (Solari Landa, M., 2020) ; représentations professionnelles9 d’un ENT (Loubère, L., 2019) ; représentations des enseignants des risques liés aux usages numériques pour eux-mêmes et pour les élèves10, usages problématiques des mondes numériques à l'adolescence (Moreau, L., 2014) ; usages pédagogiques du numérique en situation pandémique (Hazard, B., et al.; 2020) ; connaissance des dispositifs de formation numérique (Chantal Charnet2019) ; formation hybride à travers l’utilisation d’un environnement technopédagogique (Michel Ambert, 2016)…

18Lors du cinquième webinaire de l’Unesco consacré à l’enseignement en contexte Covid-19 qui s’est tenu le 17 avril 2020 11, des enseignants et directeurs de structures éducatives de par le monde entier, ont évoqué leurs expériences éducatives pendant le confinement ainsi que les solutions stratégiques pour faciliter la continuité de l’apprentissage en passant par le distanciel. « L’efficacité de ces stratégies dépend essentiellement de quatre niveaux de préparation : technologies, contenus, pédagogie, et suivi et évaluation », a expliqué lors de ce webinaire, M. Borhene Chakroun, Directeur de la Division de l’UNESCO pour les politiques et les systèmes d’apprentissage tout au long de la vie.

19Ces aspects prennent en compte l’accès à des solutions d’apprentissage à distance, la disponibilité de contenus en ligne conformes au programme d’enseignement, l’état de préparation pédagogique des enseignants, la bonne appropriation des outils numériques et la bonne réceptivité des apprenants. Le webinaire qui a réuni 280 participants a fait ressortir des difficultés également rencontrées par les étudiants que nous avons interrogés.

20Les enseignants et les étudiants du monde entier ont été confrontés à des difficultés similaires selon les capacités financières et les tailles des agglomérations. Bien que l’Arménie ait déjà expérimenté l’apprentissage à distance, 25 % des 383 000 élèves qu’elle compte n’ont pas accès à un ordinateur.

21Pis encore, le Brésil est confronté à des inégalités extrêmes, y compris sur le plan de la connectivité à haut débit. En effet, 70 % de l’accès à Internet se concentre autour de cinq grandes agglomérations. Parallèlement, plusieurs études canadiennes ont montré que les enseignants au Québec ont très peu recours aux technologies pour soutenir les apprentissages et ce pour diverses raisons d’ordre personnel ou liées à des difficultés rencontrées en contexte pédagogique (Lefebvre et Fournier, 2014). « Globalement, les enseignants se perçoivent novices quant à la maitrise des outils technologiques » (Stockless, Villeneuve et Beaupré, 2018, p.117).

22Néanmoins, il convient de rappeler que l’appropriation et l’usage des technologies dans les milieux éducatifs ne dépendent pas seulement des aspects matériels et technologiques ou de la mise en place de conditions favorables à leur usage. Comme nous l’avons vu précédemment, cela dépend également des représentations que les apprenants se font du numérique : « ces représentations sociales prennent forme dans un univers d’opinions, d’images ainsi que de connaissances populaires et scientifiques, et se cristallisent à travers les interactions et les usages des différentes parties prenantes » (Couture, 2020.p.2).

23Le contexte de crise sanitaire a-t-il contribué à façonner les représentations de l’éducation numérique à la fois chez les étudiants et les enseignants ?

24Lorsque le contexte de crise impose des changements de pratiques pédagogiques, les usages ne sont plus perçus de manière homogène et les finalités prennent des sens différents du fait du fossé (/ fracture) numérique. N’est-ce pas justement contraire au principe éducatif relatif à l’égalité des chances ? Même si le numérique et l’apprentissage à distance répondent à des besoins impératifs en palliant les difficultés de gestion dans un contexte de crise, cela peut également représenter une triple peine pour certains étudiants qui accumuleraient des inégalités d’ordre matériel, psychologique et pédagogique.

25Nous sommes à même d’affirmer que le contexte de crise sanitaire de 2020-2021, qui a accéléré les changements de pratiques pédagogiques universitaires vers l’enseignement à distance a également modifié et hétérogénéisé les représentations sociales de l’usage des outils numériques dans l’enseignement à distance en période de crise. Ces représentations sociales se sont avérées contradictoires dans le sens où des pressions d’usage sont exercées sur les individus concernés (l’obligation des étudiants et enseignants à « faire avec ») et ceci, selon les acquis individuels de chaque étudiant et enseignant.

26« Le sens éducatif dépend en somme de la norme d’usage, et c’est à partir de leurs interactions avec les autres usagers que les apprenants vont se représenter, puis s’approprier le numérique ».12

27C’est donc la question de l’égalité d’appropriation et de mise en conformité qui seraient susceptibles d’apporter des solutions efficaces sur le long terme, essentiellement, en cas de retour au confinement.

Parti-pris théorique

28Le présent travail est élaboré suivant une perspective psychosociologique. Il comporte un parti-pris théorique et une partie empirique. Le concept de représentations sociales constitue l’axe majeur du premier volet. Etymologiquement, le terme « représentation » est lié au verbe « représenter », lequel, du point de vue de son étymologie latine, vient du terme « repraesentare », signifiant « rendre présent » (« depraeseus », c’est-à-dire présent).

29Produit et processus « d’une activité mentale par laquelle un individu, ou un groupe, reconstitue le réel et lui attribue une signification spécifique » (Abric,1994), les représentations sociales (RS) sont des « programmes de perception » (Kalampalikis,2003), des « constructions sociales » » (Doise et St. Papastamou,1987), des « systèmes d’interprétation » (Jodelet ,1991). C’est « un univers symbolique, culturellement déterminé où se forgent les théories spontanées, les opinions, les préjugés, les décisions d’action, etc. » (Garnier et Sauve, 1999, p. 66)13.

30Elles servent à analyser les phénomènes sociaux, permettent de croiser différents niveaux d’analyse de la réalité (Doise,1984), régissent « notre relation au monde et aux autres, orientent et organisent les conduites et les communications sociales» (Jodelet ,1991) …

31Se constituant et se modifiant par les interactions sociales, sous l’effet des discours, s’inscrivant dans le langage et les pratiques (Jodelet, 2002), prenant la forme d’interactions verbales, de communications de masse (Moscovici, 1961), les RS traduisent le rapport que les individus et les groupes entretiennent avec le monde et les autres.

32Dans cet ordre d’idées, les psycho-sociologues parlent d’une double influence, à savoir celle des groupes sociaux sur les représentations, d’une part, et celle des représentations sur les attitudes et comportements individuels, d’autre part, ce qui justifie le qualificatif « sociale », attribué à la représentation.

33Selon Pierre Claver Mihorto (2006), plusieurs éléments peuvent contribuer à la formation des représentations sociales. L’auteur se réfère à Moscovici (1961, 1984) et cite deux processus fondamentaux de la genèse des représentations sociales : l’objectivation, qui concerne davantage l’élaboration de la représentation sociale, et l’ancrage14, qui met en évidence l’influence de la représentation sur les conduites, permet l’intégration de l’objet de la représentation dans le système des valeurs préexistant.

34Orientant les relations, les communications et les pratiques (Abric, 2003, p.375), la manière d’observer, d’interpréter et d’adapter un comportement aux événements ou situations, les représentations sociales « sont toujours des prises de positions symboliques » (Doise, 1989, p. 228) qui structurent la perception de l’objet social. Dans le présent travail, ce qui importe davantage pour nous c’est l’influence des représentations sur les opinions, les attitudes et comportements des apprenants.

35Pour ce qui concerne l’analyse du contenu et de la structure des représentations sociales, elle peut s’effectuer selon trois niveaux : information, champ de la représentation et attitude (Moscovici ,1961). L’information a trait à la source des connaissances possédées à propos d’un objet social, à sa quantité et à sa qualité, plus ou moins stéréotypée, banale ou originale (Herzlich,1972). Le champ de représentation renvoie au contenu de la représentation, au modèle social (Moscovici ,1961) évoqué par l’objet de la représentation. L’attitude exprime l’orientation générale, positive ou négative, vis-à-vis de l’objet de représentation (Herzlich, 1972) et la manière dont les individus ou les groupes se situent affectivement par rapport à un objet. L’attitude constitue le niveau le plus primitif de la représentation, la première prise de position à l’égard de l’objet étudié, influençant la structuration ultérieure de la représentation (Moscovici, 1961). Elle peut exister même en l’absence des deux autres dimensions. L’étude de ces trois dimensions (information, champ de représentation et attitude) constitue ce que Moscovici appelle l’analyse dimensionnelle. Celle-ci favorise la description du contenu et de la structure de la représentation.

36L’importance de l’étude des représentations sociales relatives à l’usage des outils numériques dans le processus d’apprentissage, en formation initiale et continue, en présentiel et à distance, découle du fait que celles-ci ont un impact certain sur les comportements des acteurs-usagers, plus particulièrement les enseignants et les apprenants (Rodica, A. et al., 2018).

37Un nombre important de recherches entreprises en la matière soulignent que les bénéfices apportés par les outils et les technologies numériques dépendent en grande partie des conditions préalables et, plus particulièrement, des représentations du numérique (Balanskat et al, 2006 ; Harrison et al., 2002 ; Kennisnet ICT op School, 2006 ; Machin, McNally et Silva, 2006).

38Les représentations sociales peuvent mettre à jour les « théories naïves », attitudes et croyances, qui provoquent des discours, porteurs de sens en termes de conflits entre sentiment d’étrangeté, positionnement idéologique face à la nouveauté, niveau d’expertise singulier, pression ressentie sur le plan des usages… (Carugati et Tomasetto ,2002)

39Dans le même ordre d’idées, on peut dire que les représentations sociales sont à envisager comme la genèse de l’utilisation ou non du numérique, qui se résume en une « dialectique changements/résistances » (Assude, Bessières, Combrouze et Loisy, 2010).

40Plusieurs études (Bruillard, 1997 ; Carugati et Tomaseto, 2002 ; Wagner et Clemence, 1999 ; Giannoula, 2000 ; Orange, 1990 ; Tiemtoré, 2008 ; Trabal, 1996) ont mis en évidence des représentations sociales des TIC dans le domaine de l’enseignement.

41Plantard (2016) préfère l’expression « techno-imaginaires ». Pour lui, ces perceptions « forment les grands récits mythologiques qui servent de références symboliques aux représentations sociales que nous avons des ordinateurs et d’Internet. Les représentations-perceptions peuvent susciter des attitudes positives quant à l’usage des TIC ou stimuler des attitudes négatives envers ces mêmes technologies. Positives ou négatives, elles dépendent de la première image mentale qu’on se fait des technologies. Elles vont évoluer à travers nos expériences avec les machines » (Plantard, 2016 : 24)

42Boissonneault (2003) met en évidence le fait que les représentations des apprenants de l’usage du numérique dans l’enseignement en ligne se fonde sur l’utilité des TIC et leur pertinence en termes de remédiation à la distance.

43Bon nombre de recherches ont abouti à un constat selon lequel les représentations sociales de l’outil numérique génèrent des attitudes et comportements se traduisant en acceptation (/ appropriation) ou en résistance-rejet de l’outil numérique ou de la « pédagogie numérique », concrétisée à travers l’enseignement à distance.

44D’un autre côté, il a été démontré que ces représentations influent, dans une large mesure, sur les pratiques (Summers, 1990) en ce sens que les représentations plutôt négatives auraient des conséquences directes sur les attitudes des apprenants, déclencheraient des peurs et diminueraient la confiance. A l’inverse, les représentations positives seraient favorablement corrélées aux actions des enseignants / apprenants (Berney et Pochon, 2000 ; Chenu et al., 2003 ; Felder, 1989 ; Lillard, 1985 ; Loyd et Gressard, 1986 ; Archambault, 2011 ; Rinaudo, 2002), d’où l’importance d’appréhender les représentations sociales attachées au numérique, pour éclairer les usages.

45Pour notre part, nous supposons que notre population d’enquête a une représentation sociale de la « pédagogie numérique » plutôt axée sur la perception de la valeur ajoutée de cette forme d’enseignement, notamment en ce qui concerne une meilleure assimilation des cours, une meilleure évaluation du travail de l’apprenant et, par voie de conséquence, des opportunités de réussite plus grandes et une réduction de l’inégalité des chances...

Représentations de la pédagogie numérique

46Notre échantillon se compose de 100 étudiants, à majorité féminine (72%)15, dont la plus grande proportion (68%) est originaire de France. La grande majorité des sujets, soit 80%, appartient à la tranche d’âge comprise entre 20 et 25 ans.

47Pour la moitié des sujets (50%), le travail au moyen de l’outil numérique « est accommodant dans certains cas ». Les sujets composant l’autre moitié se répartissent, à proportions quasi-égales, entre « cela me correspond parfaitement » (20%) et « cela est contraignant » (22%)16.

48Du point de vue du niveau de performance en termes d’usage de l’outil numérique par auto-évaluation, les sujets se répartissent, à proportions quasi-égales, entre quatre niveaux, comme suit : débutant (besoin d'aide, de concentration) :22 % ; compétent (mise en place de routines) : 28 % ; performant (maîtrise des règles) : 28% ; expert (autonome, agit intuitivement) : 22%.

49Hormis à peu près le quart des enquêtés qui s’auto-perçoivent comme étant « débutants » (22%), la grande majorité d’entre eux perçoit son niveau comme variant de « compétent » (28%) à « expert » (22%) en passant par « performant » (28%), soit un total de 78%.

50Une forte proportion de sujets pense que les outils numériques facilitent l’apprentissage (78%). Presque la même proportion17 considère l’apprentissage sans l’usage des TIC comme étant « Impensable » (34%), « Moins intéressant » (20%), voire « Impossible » (16%). Il n’en demeure pas moins, la plus grande proportion (82%)18 considère que « l’enseignement à distance altère la relation enseignant-apprenant », en dépit de la possibilité d’interagir avec les enseignants (84%), plus particulièrement avec ceux des sciences humaines et sociales (57%).

51Un peu plus de la moitié des apprenants (58%) est d’avis que le « distanciel » « assure une meilleure autonomie de l’apprenant ». Toutefois, les enquêtés sont relativement majoritaires à considérer que l’apprentissage en ligne ne permet ni une meilleure assimilation du cours (66%), ni une meilleure évaluation du travail de l’apprenant (54%), la proportion de ceux ayant répondu par l’affirmative à cette question (Q.16) étant de seulement 20% et celle des indécis (« neutres ») de 24%. D’ailleurs, à propos de réponses « neutres », nous notons qu’une certaine proportion de sujets ne sont pas en mesure de trancher et oscillent entre le « Oui » et le « Non », le « pour » et le « contre ». Une légère majorité des sujets (56%) dit ne pas rencontrer de difficultés à suivre les cours en ligne (Q.18), quoique presque les 3 quarts d’entre eux (72%) affirment ne pas avoir reçu de formation particulière pour l'usage de l’outil numérique en classe (Q.19).

52En dépit de leur niveau de performance assez élevé en termes d’usage de l’outil numérique, la majorité des apprenants exprime une préférence pour la « pédagogie classique », via l’enseignement présentiel. Cela pourrait être justifié par les diverses difficultés rencontrées par eux. Celles-ci sont de différents types et peuvent être répertoriées comme suit :

  • Difficultés inhérentes à l’apprenant (« Problème de concentration », « moins de concentrations(S.9 ;F) », « concentration » (2) ; « toutes sortes de difficultés de concentration » ; « Du mal à me concentrer » (S.31 ;F) ; « Difficultés de rester concentrée et attentive » ; « le manque de concentration » (3fois) ; « Parfois la concentration »(S.41 ;F) ; « Problème de concentration » ; «…de compréhension de cours » (3fois) ; « perte de motivation »(2) ; « difficultés de motivation » (2), « démotivation ») ; « On est pas captivé par le cours et on effectue d’autre tâche chez nous » [manque de concentration] (S.3 ;M) ; « lassitude »(S.12 ;M)  ; « perte de motivation » (S.50 ;F) ;

  • Difficultés d’ordre technique (« Problème de connexion » (5fois), « environnement de travail pas toujours calme (S.13 ; F) » ; « Des problèmes avec l'application Webex (S.23 ; F) » ; « problèmes de son » ; «  ordinateur qui a des problèmes » (S.12 ;M) ; « problème d’informatique » ( S.46 ;F) ; « les TIC utilisées ne sont pas toujours performantes et certain professeur ne savent pas exploiter les possibilités infinies des TIC pour rendre un cours plus intéressant ».(S.50 ;F)

  • Difficultés inhérentes à l’enseignant (« certain professeur ne savent pas exploiter les possibilités infinies des TIC pour rendre un cours plus intéressant » ; S.19 :M)

  • Difficultés spécifiques à certaines matières (« les matières scientifiques comme les mathématiques ou la comptabilité » ; « Les mathématiques et les statistiques » ; « cours compliqués et très techniques tels que la comptabilité l’économie ou les maths » (S.38 ; F) ;

53 Un certain nombre de sujets (28%) jugent l’interaction possible aussi bien avec les enseignants des matières scientifiques qu’avec ceux des sciences humaines et sociales. Les autres sujets sont légèrement majoritaires (57%) à considérer qu’il est possible d’interagir avec les enseignants des disciplines (/sciences) humaines et sociales.

54Les deux tiers des sujets (66%) sont d’avis que l’usage du numérique provoque des troubles de la santé (Q.20-a). De même, pour quasiment la même proportion (64%) il engendre des inégalités d’accès à l’information (Q.20-b). Une grande majorité d’entre eux (80%) considère qu’il « perturbe l’attention de l’apprenant » (Q.20-e) et une proportion moindre est d’avis que l’usage de l’outil numérique « expose aux virus informatiques et au piratage » (Q.20-c ; 56%) et « entraîne des comportements addictifs » (Q.20-d ; 56%).

5582% des sujets pensent que l’utilisation des équipements numériques modifie les rapports enseignants-apprenants (Q.21). 68% d’entre eux disent préférer l’apprentissage présentiel à l’apprentissage distanciel (Q.22) ; 60% considèrent que l’usage du numérique dans l’apprentissage à distance ne permet pas d’améliorer les résultats de l’apprenant, en général, et les leurs en particulier (Q.23). 56% sont d’avis que la crise de la Covid-19 a affecté leur moral et leur motivation à poursuivre les études universitaires (Q.26).

56Pour ce qui concerne les obstacles auxquels font face les sujets, il est clair que l’obstacle principal c’est la connexion, pour un peu plus de la moitié d’entre eux (52%). Viennent, respectivement, en second lieu, le temps (30%) et en troisième lieu, le matériel / équipement (18%). Une bonne proportion de sujets (24%) affirme ne rencontrer aucun obstacle pour suivre les cours à distance.

Attitudes à l’égard de la « pédagogie numérique »19

57Il ressort des données recueillies que la prédominance des représentations relativement négatives génère des attitudes et comportements négatifs se traduisant par le refus, si l’on peut dire, de la « pédagogie numérique », à laquelle les apprenants préfèrent la pédagogie classique.

58En effet, la grande majorité des sujets, quasiment les ¾, soit 74%, préfère l’enseignement présentiel / en présence (Q.8 – « Préférez-vous … ? ») et ce pour diverses raisons. Nous en citons les plus récurrentes, celles que nous jugeons plus pertinentes : « le présentiel permet une meilleure compréhension des cours ainsi que la possibilité de sociabiliser » (S.2 ; F) ; « car il est plus simple d’apprendre » (S.3 ;M) ; «  j’arrive à mieux suivre et a me concentrer »( S.4 ;F) ; « pour des raisons de l’inégalité des chances pour réussir »(S.6 ;M) ; « Parce qu’il y a le contact humain.» (S.8 ;F) ; (S.9 ;F) ; « Je préfère être en face des personnes pour échanger »(S.10 ;F) ; « En présentiel, l’apprentissage est déjà fait à 50% »(S.13 ;F)

59Nous pouvons dire que les raisons pour lesquelles les apprenants préfèrent la « pédagogie classique » (enseignement en présentiel) ont trait à :

  1. La dimension communicationnelle et relationnelle : « l’enseignement présentiel … nous permet d’avoir un lien social avec les professeurs et nos camarades. » (S.47 ;F) ; « le présentiel … nous avons plus de vie sociale. » ( S.44 ; F) ; « tout simplement parce que on voit du monde, on se sociabilise … » (S.36 ;F) ; « [en présentiel ] …cela permet aussi de travailler par groupe avec nos camarades » (S.34 ;F) ; « pour l’ambiance … »(S.16 ;F) ; « la communication et l’ambiance (S.24 ;M) ;

  2. L’interaction et l’interactivité : « nous pouvons plus facilement demander plus d’explications aux professeurs en cas d’incompréhension du cours ou des TD » (S.47;F) ; « nous pouvons avoir nos professeurs près de nous en cas de difficulté » (S.34 ;(F) ; « cela permet … de poser toutes les questions que nous voulons aux professeurs. »(S.22 ;F)

60Ayant posé une question-contrôle (Q.22), nous avons recueilli des données confirmant cette préférence de la part de la majorité des sujets, quoiqu’à une proportion relativement moindre (68%), pour l’« apprentissage en présentiel » et ce pour de multiples raisons dont nous faisons l’inventaire ci-après.

61Les sujets qui préfèrent l’apprentissage présentiel justifient cela de la sorte20 : « trop de difficulté diverse à distance cf. solitude, problème informatique, connexion internet, qualité des cours, etc. » (S.2 ;F) ; « meilleur apprentissage en présentiel » (S.3 ;M) ; « meilleure apprentissage , maximum de concentration, assiduité , moins d’isolement parce qu’on est en interactions entres les élèves /enseignants » (S.9 ;F) ; « c’est plus motivant car chez soi on est seul derrière son écran sans interactions et des explications moins équivoques » (S.10 ;F)  ; « pouvez gagner beaucoup de temps en vous déplaçant entre l'école et la maison » (S.15 ; M) ; « d’autant plus avec cette période de crise qui nous rappelle l’importance de l’interaction humaine »(S.16 ;F) ; « pour ainsi avoir une meilleure compréhension du cours » (S.17 ;F) ; « l’enseignement présentiel car on est sûr de rester concentrer. »(S.18 ;M) ; « C’est la méthode qui me correspond le mieux » (S.20 ;F) ; « le cours en présentiel motive plus que les cours à distance et on acquiert plus de compétences et d’informations » (S.21 ;F) ;  « J’opte pour l’apprentissage en présentiel car je trouve qu’on peut vite assimiler les cours mais aussi comprendre des choses qu’en distanciel c’est difficile » (S.25 ;M) ; « je préfère en présentiel car il est quand même plus simple de suivre et de comprendre le cours. On est très vite déconcentrés lorsque l’on travaille chez nous et nous n’avons pas d’espaces personnel et « professionnel » séparés, ce qui joue beaucoup sur notre moral car nous restons la plupart du temps chez nous, à ne plus sortir et voir d’autres personnes. Il n’y a plus de contact physique. De plus, lorsque l’on étudie en distanciel il peut y avoir des obstacles car nous sommes dérangés par nos proches, ou alors nous trouvons plus le lien de connexion du cours, ou alors nous n’avons plus de batterie et que par conséquent ça coupe le cours, etc. » (S.34 ;F) .

Les effets pervers de l’apprentissage à distance

62Dans le présent article, nous nous intéressons aux ambivalences dans les deux approches pédagogiques (présentiel et distanciel) pour mieux appréhender les effets du modèle pédagogique à distance. Nous distinguons également l’apprentissage numérique de l’apprentissage à distance continu, les deux formes pouvant converger et diverger à certains niveaux.

63L’enseignement à distance, également appelé formation à distance, enseignement en ligne ou e-learning, renvoie à une modalité d’enseignement qui « permet à une personne d’apprendre de manière continue et de façon relativement autonome, avec des contraintes minimales d’horaire et de déplacement, et avec le soutien à distance de personnes-ressources »21, représentées , pour notre cas , par les professeurs, toutes disciplines confondues, sans certitude d’une maitrise des outils utilisés ou d’une aptitude à former les étudiants au numérique.

64En outre, cette forme d’apprentissage nécessite l’initiation à l’usage de l’outil numérique, de l’enseignant, pour qu’il soit en mesure de concevoir des cours et des exercices interactifs avec les apprenants. La bonne assimilation des cours à distance est tributaire de la maitrise du numérique aussi bien par les professeurs que par les étudiants.

65Hérvé Tribet et Sébastien Chalies (2014) soutiennent l’idée que « le numérique doit dépasser son seul statut d’outil » pour pouvoir occuper une place stratégique et pédagogique forte. Comme l’affirme le sociologue Laurent Hublet, « il ne faut pas confondre numérique et distanciel comme il faut arrêter de croire que le numérique n’est qu’un outil ».22

66Interviewé sur le même sujet, Renaud Maes en donne une réponse limpide et complémentaire : “Il y a une grande confusion entre l’utilisation d’un outil et la compréhension d’un outil. Ce n’est pas parce que j’utilise un logiciel que je comprends ce logiciel. Ce n’est souvent pas clair dans la tête des étudiants et des professeurs.23

67Ces éléments de compréhension ouvrent des pistes quant à l’autonomie de gestion des cours de la part des universitaires. Il importe de rappeler que l’autonomie pédagogique et scientifique fixée par les universités réside dans le contenu des programmes, les méthodes pédagogiques et les modalités de contrôle des connaissances. L’établissement universitaire est donc garant de ce fonctionnement de manière indépendante, y compris sur le plan pédagogique.

68Selon le décret du 24 avril 2017, les conditions de la validation des enseignements dispensés à distance, le cas échéant sous forme numérique, sont arrêtées dans chaque établissement d'enseignement supérieur au plus tard à la fin du premier mois de l'année d'enseignement et ne peuvent être modifiées en cours d'année. Ainsi, la validation des enseignements, contrôlée par des épreuves organisées à distance sous forme numérique, est garantie par :

691.La vérification que le candidat dispose des moyens techniques lui permettant le passage effectif des épreuves ;

702. La vérification de l'identité du candidat ;

713. La surveillance de l'épreuve et le respect des règles applicables aux examens.

72Notons que dans ce décret, il n’est pas mentionné que l’étudiant dispose d’une formation préalable et nécessaire à la bonne appropriation de l’outil numérique. Il n’est pas mentionné non plus de dispositifs d’aide favorables à l’égalité d’accès à internet ou au matériel indispensable à l’éducation par le numérique. Finalement, le même décret ne présente aucune clause de mesures particulières en cas de pandémie comme celle de la Covid-19.

73En conséquence, dans un contexte exceptionnel, l’usage du numérique exclusif à cette forme d’apprentissage, l’identité du candidat et sa présence assidue aussi bien au cours que durant les épreuves de contrôle ne sont plus soumis à la réglementation en vigueur, ce qui soulève des questionnements quant aux modifications des dispositifs pédagogiques.

L’altération des modes d’apprentissage

74L’addition de ces facteurs institutionnels et pédagogiques se greffe au contexte de crise sanitaire qui a imposé, de manière imprévisible et massive, le passage à l’enseignement à distance en milieu d’année universitaire (pour la première période de confinement), à deux mois de la rentrée (pour la période de reconfinement). On suppose alors que l’altération des modes d’apprentissage a entraîné des effets plus ou moins négatifs.

75Quelques questionnements viennent soutenir notre raisonnement : Les enseignants maitrisent- t-ils , suffisamment, la pédagogie numérique nécessaire à ce mode d’apprentissage ? Cette forme d’apprentissage constitue-t-elle un changement favorable aux étudiants ? Entraine-t-elle, au contraire, des effets néfastes sur le plan intellectuel, physiologique ou encore psychologique ?

76Face à un contexte « extra-ordinaire » de formation exclusivement distancielle, les effets pervers de ce type d’apprentissage s’avèrent axiomatiques.

77Raymond Boudon (1977) a mis en évidence ce qu'il nomme « effets pervers », c'est-à-dire des « phénomènes de composition où l'addition d'actions individuelles rationnelles produit des effets inattendus et contraires aux intentions de chacun ». Comme l’affirme Ben Jdira (2013), si nous retenons l’idée d’un déterminisme technologique, nous pouvons considérer, que « de nos jours, prévaut un déterminisme plus « souple », selon lequel la technologie est le facteur clef, parmi d’autres, qui va engendrer les changements sociétaux. »

78Dans son analyse du phénomène « d’effets pervers », Boudon considère les faits sociaux en tant que « résultats _ inintentionnels, le plus souvent imprévisibles voir irrationnels_ de la combinaison de comportements individuels, intentionnels ».

79Pour notre cas, il s’agit d’addition d’actions politiques et institutionnelles en réaction à une crise sanitaire, ce qui a eu une incidence sur le système pédagogique, universitaire en l’occurrence. Nous supposons que cette situation a fortement impacté le moral et le comportement des étudiants en générant des effets pervers, inattendus et contraires aux intentions politiques et institutionnelles, en ce sens qu’en cherchant à maintenir les activités universitaires et à les adapter en faveur de la réussite des étudiants, il s’est produit quelques fois l’effet inverse…

80Le croisement des données statistiques recueillies au moyen du questionnaire fait ressortir les effets inattendus de cette méthode pédagogique sur les étudiants. En effet, nous constatons que 77% de ces derniers ne sont pas originaires de Roanne, ce qui s’ajoute aux problématiques psychologiques et d’isolement. 55% travaillaient avant le confinement et se sont retrouvés sans revenus pendant la période de crise sanitaire. Cet aspect financier n’est pas sans incidences négatives sur la réceptivité des étudiants.

81Les résultats de l’enquête ont fait ressortir les difficultés rencontrées par 78% des étudiants durant toute la période de confinement. Il convient de souligner que 36% de ces difficultés sont d’ordre matériel, psychologique, parfois physiologique. A titre d’exemple, les apprenants qui suivent une formation en ligne passent énormément de temps devant leur ordinateur et d’autres outils numériques, ce qui entraîne une fatigue visuelle, des douleurs dues à de mauvaises postures ou d’autres problèmes physiques, qui peuvent affecter la santé de l’apprenant. Les aspects psychologique et physiologique constituent un véritable obstacle à la bonne assimilation des cours, sous une forme inhabituelle pour les étudiants, du fait de la non-maitrise des outils, des aléas du distanciel et de l’aggravation de leur état psychologique, causé par l’isolement et la solitude que génère cette situation (46%).

82Les travaux de Cathia Papi et Jean-Luc Rinaudo (2021) ont démontré à quel point les « e-liens »24 _ existant dans le cadre d’interactions en ligne à travers des dispositifs de formation incluant des technologies numériques _ sont primordiaux dans un contexte de confinement pédagogique. Sans dynamique des « e-liens », la situation psychologique de l’étudiant risque de s’aggraver du fait de l’isolement, sachant que dans ce contexte, « extra ordinaire », les interactions et les dynamiques qu’elles génèrent dépendent des acteurs et des dispositifs propices aux bons usages éducatifs des technologies numériques.

83Les dispositions mises en place ont permis d’assurer la continuité des cours et de sauver l’année universitaire. Les données recueillies ont révélé des attitudes favorables au changement de la part d’une minorité d’étudiants s’étant adaptés facilement à la nouvelle situation (20%), D’autres se sont montrés soit plus résistants au changement (55%) soit fragilisés par cette forme d’apprentissage sur le plan essentiellement psychologique (48%), matériel (37%), pédagogique (55%).

Des effets pervers au prisme de la pédagogie numérique.

84Conscients de la pluralité des facteurs à l’origine des difficultés rencontrées dans l’apprentissage à distance, nous avons mis l’accent sur les effets néfastes dit « pervers » de ce dispositif pédagogique.

85A la question 9, relative à l’altération de la relation enseignant-apprenant25, la grande majorité des étudiants (82%) considère que l’enseignement à distance altère la relation enseignant-apprenant « car il n’y a plus ce contact et cet échange avec les enseignants (S.25, M)26. Les étudiants justifient cela comme suit : « l’échange physique est toujours mieux » (S.1, F) ; « L’élève étant face à un écran ne ressent pas de présence humaine et la relation établie n’est pas la même que dans le cas où il peut questionner l’enseignant en face à face. » (S.7, M) ; « La relation enseignant-apprenant est altérée puisqu’on ne voit qu’un écran, tous les enseignants n’allument pas leur caméra donc c’est compliqué de se rendre compte qu’il y a quelqu’un derrière le micro. » (S.13, F) ; « Il y a beaucoup moins d’interaction » (S.16, F) ; « nous ne pouvons pas interagir comme on le veut en distanciel » (S.17, F) ; « Moins d’interaction, car peu familiariser avec l’enseignant » (S.19, F) ; « L’enseignement à distance ne permet pas de dialoguer et de poser les questions aux professeurs de la même façon. De plus, en distanciel certains professeurs font uniquement leur cours s’en forcément prendre le temps de discuter avec les élèves. » (S.22, F) ; « Nous ne connaissons même pas certains de nos enseignants et la communication reste moins importante qu'en présentiel » (S.23. F) ; « Lorsque c’est en présentiel, il est plus simple d’interagir avec les enseignants, il y a un contact physique. En distanciel, il faut attendre les réponses des mails, où nous n'avons parfois pas de réponses. » (S.30, F) ; « La communication est plus compliqué lorsque nous avons du mal à comprendre certains points » (S.31, F) ; « Moins d’interaction, car peu familiariser avec l’enseignant. » (S.50, F) ; « aucune communication non verbale n’est possible » (S.39. M)…

86Les difficultés sont majoritairement liées à l’absence de communication spontanée, en face à face. En effet, l’interaction est quasi inexistante pour certains cours à distance tels que les Cours Magistraux : « nous ne pouvons pas poser les questions que l’on se pose car la réponse ne sera pas la même qu’en face à face. » (S.36. F). L’absence physique du professeur accentue également les difficultés morales et le sentiment d’isolement de certains étudiants : « le coté physique aide à avoir de la sympathie » (S.42, M) ; « le fait de voir la personne en vrai c’est totalement différent et bien mieux. » (S.43,F) ; « car il y a moins de contact et souvent pas la possibilité de se voir avec les caméras, les professeurs ne savent donc plus à qui ils s’adressent. » (S.45.F) ; « on ne voit pas les personnes à qui on s’adresse, certain professeur ne nous ont jamais vu de l’année, ils ne nous connaissent pas » (S.41.F)

87 Pour ce qui est de l’appréciation de cette méthode pédagogique27, 66% des sujets considèrent que l’enseignement à distance ne permet pas une meilleure assimilation du cours. Pour eux, « il est bien plus difficile d’assimiler les cours. » (S.2. F), « une présence en classe permet une meilleure concentration et moins de risque de distraction. » (S.7. M), « [à distance] l’on est plus souvent fatigués et moins bien concentrés » (S.10.F), « l’éducation à distance favorise la démotivation » (S.12. ,M), « retenir le contenue d’un cours à distance peut s’avérer plus difficile » (S.16 . F), « on est moins motivé d’apprendre quand on fait tous nos cours a la maison, on ne voit pas la nécessité » (S.21. F), « je trouve que c'est encore plus compliqué à assimiler le cours » (S.23. F), « je trouve qu’une présence physique est mieux pour pouvoir expliquer le cours » (S.30. F).

88C’est également une difficulté liée à la concentration : « on a tendance à moins suivre derrière un écran. » ( S.34. F), « ça rend paresseux et c’est très dangereux car finalement les étudiants n’ont pas de niveau même s’ils valident leur année » (S.37. M), « le fait d’être derrière un écran on est moins investis en cours de plus en étant chez nous nous ne sommes pas dans un cadre scolaire ou on sait que nous devons écouter, participez et s’impliquer » (S.40. F) , « il y a beaucoup plus de distraction »(S.41(F) , « le cours n'as plus son sens »(S.48. F).

89Cette question a suscité bon nombre de réactions de la part des enquêtés. C’est sans doute l’aspect le plus contraignant en termes d’efficacité et de retour d’expérience pédagogique. En effet, sans les impacts positifs, escomptés, sur les résultats de l’étudiant (sa moyenne finale), la complexité du processus d’apprentissage en distanciel n’en est que davantage amplifiée.

90Il convient de souligner que, du fait de son aspect contraignant, cette pratique pédagogique en distanciel entraîne inéluctablement d’autres effets inhérents à la qualité et à l’efficacité. C’est d’ailleurs l’une des hypothèses que nous avions émises.

91En réponse à la question 1628, 54% des sujets considèrent que l’enseignement à distance ne permet pas une meilleure évaluation du travail de l’apprenant : « il est plus facile de « tricher, de s’appuyer sur les cours, lors des contrôles à distance » (S.2.F) , « la plus part des enseignants diminue le temps des partiels parce que ils estiment qu’on va tricher etc... »( S.9.F), « triche possible » (S.12 .M), « il ne reflète pas le travail réel de l’étudiant » (S.16.F),« Le travail fourni n’est pas le même car l’enseignement n’est pas le même, nous pouvons avoir accès à nos cours et à internet lors de l’évaluation »(S.30.F), « les professeurs pensent que forcément parfois certains travaux ne viennent pas de nos révisions mais de la triche et cela pénalise énormément. » (S.34.F), « Je ne pense pas car bien évidement on n’est pas surveillé lors des évaluations donc on peut tricher plus facilement et je pense que ce n’est pas représentatif de nos acquis »(S.40.F) , « beaucoup d’évaluation ont eu des bug en ligne au moment de télécharger la copie d’examen sur la plateforme. »(S.41.F), «on se sent plutôt perdu et même avec le temps on perds la motivation » (S.48.F).

92Ces constats mettent en exergue la qualité des cours ordinaires en présentiel, pour lesquels l’appropriation n’est plus discutable. Le distanciel modifie les rapports enseignant-étudiants en termes d’accompagnement et d’évaluation du cours. Le contrôle en présentiel n’est plus possible, que ce soit pour vérifier la présence de l’étudiant à la formation (il peut se connecter sans certitude de sérieux, l’assiduité peut ainsi être scénarisée). Il en est de même pour le passage des épreuves d’examen où aucune vérification de « triche » ne peut être effectuée, excepté les logiciels anti-plagiat. Conscients de la fragilité de ce dispositif, les étudiants se sont exprimés sur leurs propres craintes.

93Les réponses à la question 1729 soulignent la faible efficacité de ce dispositif malgré la mesure palliative en contexte de crise sanitaire. Sur les 100 enquêtés ayant répondu à notre questionnaire, seule une faible minorité d’étudiants (6%) considère que l’enseignement à distance assure une meilleure formation académique, contre 56% (Non) et 34% (Neutres). En voici les justifications :

94« L’éducation en présentiel est meilleur. » (S.7.M), « l’enseignant est moins à notre écoute car comme on est souvent plus nombreux poser des questions est plus difficile » (S.10. F), « l’acquisition des informations diminue même nulle dans certaines matières car on n’a pas la motivation de bosser » (S.21. F), « cela créé beaucoup d’inégalités » (S.22. F), « ça nous pénalise aussi sur certaine chose » (S.25. M), « ce n’est pas pratique pour apprendre le distanciel. »( S.34. F), « c’est une aide mais pour moi il n’assure pas une meilleure formation. » ( S.40. F), « sans lien avec les professeurs, c’est difficile d’avoir une bonne formation académique » (S.41. F), « on n’ose pas poser les questions et des fois les profs ne voient pas nos questions dans le chat. » (S.45. F).

95Au-delà de l’efficacité, les étudiants sont à la recherche d’une pédagogie « rassurante » soit, à l’image de ce à quoi ils ont été, jusqu’aujourd’hui, habitués. Ils ont d’ailleurs tendance à confondre la qualité de l’apprentissage avec la présence physique de l’enseignant.

96Cela proviendrait du fait que les étudiants ont une perception figée de l’enseignement et des conditions de réussite. Pour la majorité des étudiants, l’image de l’enseignant est celle d’un coach ou d’un guide qui doit accompagner et rassurer les étudiants par sa présence, sans quoi leur représentation de la pédagogie en serait altérée.

Le fossé numérique révélé en temps de pandémie.

97Par ailleurs, concernant les aspects pervers de l’apprentissage à distance, les réactions des étudiants démontrent la fragilité de cette méthode en termes d’égalité d’accès à l’information, à l’instar des réponses à la question 2030 : 64% des enquêtés considèrent que l’usage du numérique engendre des inégalités d’accès à l’information. Il faut préciser que la crise sanitaire a également engendré ou amplifié les problèmes financiers. Les coupures internet ont été fréquentes suite au non-paiement des factures. A cette réalité, se superpose un ensemble de difficultés d’ordre matériel.

98Les justifications sont comme suit : « et si on n’a pas internet » (S.1.F) ; « du fait qu’on n’ait pas tous les mêmes accès aux ordinateurs ou à internet et donc pas tous les mêmes facilités techniques. » (S.2.F) ; « Ceux qui ont accès à un internet peuvent percevoir les informations plus rapidement. » (S.7 (M) ; « Pas tout le monde a les mêmes moyens pour accéder à l’information » (S.8 (F); « Ceux qui n’ont pas les moyens peuvent pas se procurer un ordinateur . Et de fois l’assistant social refuse l’aide soit disant on est hébergé mais ça se peut les personnes qui les hébergés c’est pas des membre proprement parlant de leur famille ou que leurs familles n’ont pas mes moyens de les aider sinon ils iront pas voir l’assistant social » ( S.9(F). « Tous le monde n’a pas un abonnement internet ou d’ordinateur pour suivre un cours ou avoir accès à de l’information »( S.13 (F) ; « puisqu’il y a une inégalité d’accès à l’outil informatique. » (S.16 (F) ; « Tout le monde n'a pas les moyens d'avoir une bonne connexion à internet.» ( S.17 (F) ; « Certains étudiants n'ont pas d'accès à l'application ou à un réseau » (S.23 (F) ; « car ce n’est pas tout le monde qui a les moyens de se procurer ces outils informatiques au moins en présentiel on peut utiliser les ordis de la fac » (S.25(M) ; « cela qui le maitrise le plus aura plus d’information que l’autre» (S.26 (F); «certains élèves ne reçoivent pas toutes les informations ce qui les pénalise énormément. » (S.34(F); « Performances de la personne et de l’outil » (S.35(F) ; « Certaines personnes n’ont pas les mêmes accès que d’autre à du matériel informatique à une connexion internet ou ne savent pas utiliser leur matériel. » (S.40(F); « car les personnes n’ayant accès qu’a Webex ne peuvent pas participer au cours donné sur une autre plateforme. » (S.45(F) ; « par exemple les personnes sans bourse et venant de loin peuvent ne pas avoir les moyens de se procurer des outils informatiques ; aussi les personnes qui n’ont pas pu avoir une formation en informatique. Personnellement, je n’avais aucune connaissance en informatique et juste en suivant les cours à l’université j’ai pu m’améliorer très facilement et rapidement » (S.49.F)

99On constate, à travers les réponses fournies, que les obstacles matériels et numériques préoccupent considérablement les étudiants et constituent, de leur point de vue, une difficulté notoire dans le dispositif pédagogique à distance.

100Marcel Desvergne décrit parfaitement le fossé entre la pédagogie classique et celle du numérique :« il faut former à comprendre, rassurer, protéger, se préoccuper aussi des questions techniques, certes, mais sous la condition qu’on articule le tout, et pas simplement les machines en tant que telles ».31

101Selon lui, « les décalages entre la réalité de notre monde en évolution et l’école sont importants. Un certain nombre de décisions en termes d’éducation ont été prises sans tenir compte des réalités ». C’est précisément le passage transitoire vécu, du fait de la crise sanitaire, qui a déstabilisé la vision, de bon nombre d’étudiants, de la pédagogie à distance générant des effets contraires aux objectifs opérationnels du dispositif.

102Si la solution de l’apprentissage à distance a évité aux universités une éventuelle inertie par l’enseignement à distance synchrone32, elle a engendré, malgré elle, des effets négatifs, voire pervers, qu’il était difficile d’anticiper. Il ressort de notre interprétation des données recueillies, une difficulté majeure liée à la formation au numérique et à l’appropriation des outils numériques (ordinateur, tablette…). A travers une analyse comparative, nous avons pu constater l’impact de ces pratiques, à distance, en termes de fossé (/fracture) numérique.

Conclusion

103Pour conclure, nous pouvons dire que les données recueillies au moyen du questionnaire nous ont permis d’explorer cette catégorie d’apprenants au niveau de leur vécu estudiantin, en période de pandémie de la Covid-19 et de leur façon d’évaluer cette expérience inédite, imposée par la situation sanitaire, aussi bien pour les apprenants que pour les enseignants.

104Nous avons pu appréhender leurs représentations de l’apprentissage à distance et leurs attitudes à l’égard de ce que certains appellent « pédagogie numérique ». Une analyse statistique des données quantitatives nous a permis de dresser les portraits des enquêtés. Grâce à une analyse de contenu des données qualitatives (corpus de réponses) nous avons pu explorer les opinions, attitudes et comportements des apprenants à l’égard de l’usage du numérique dans l’apprentissage à distance.

105Il s’est avéré que les attitudes et comportements des enquêtés sont imprégnés de leurs représentations. Dit autrement, la prévalence des représentations négatives a généré des attitudes et comportements négatifs se traduisant par un « rejet » certain de la « pédagogie numérique », à laquelle les sujets disent préférer la « pédagogie classique ». D’ailleurs est-il possible de parler de pédagogie numérique, recourant au simple usage des outils numériques, sachant que la pédagogie ne se limite pas à l’outil, à la technologie et se base sur des fondements humains dont, notamment, la communication, l’interaction et l’interactivité… ?

106Les avantages de l’apprentissage en ligne sont nombreux : le fait d’être en mouvement sans se déplacer, l’efficacité, l’accessibilité et la polyvalence, entre autres. Or, selon les résultats de notre enquête, force est de constater que la formation à distance présente, aussi, certains inconvénients, notamment au niveau technologique et humain. L’interaction et la communication restent systémiques et subsidiaires. Certes, le progrès technologique répond à des besoins, il est considéré comme un outil salvateur, mais il ne peut se substituer à la présence indispensable de l’humain.

107L’expérience de la crise sanitaire a marqué les esprits et bouleversé les habitudes. En imposant les gestes barrières, elle a imposé le travail à distance. Le numérique a permis de rester connectés socialement et à l’échelle mondiale. Reconnaissons-lui ce transhéroïsme sans oublier l’importance du maillage social et de la relation humaine, en particulier avec les enseignants. Le souvenir du regard sévère d’un professeur ne pourra s’effacer de la mémoire d’un élève ou d’un étudiant, surtout les enseignements que ce regard lui a permis d’en tirer. Il reste encore des zones que le numérique ne peut encore atteindre. C’est, entre autres, le secret qui donne la profondeur aux personnes et détermine leur degré d’intérêt aussi bien au monde qu’au numérique.

108Bibliographie

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Notes

1 Un dispositif de formation hybride se caractérise par la présence de dimensions innovantes liées à la mise à distance et suppose l’utilisation d’un environnement technopédagogique.

2 Cités par Michel Ambert, in « Echange, apprendre et formation à la pédagogie numérique ». 2016. ffhalshs-01413619f

3 Administration Economique et Sociale

4 Centre Universitaire Roannais (situé à Roanne) Une antenne de l’université Jean Monnet St Etienne ( à St Etienne dans la Loire).

5 Le choix de la population d’enquête (la filière d’études et l’université) a été dicté par les critères disponibilité et prédisposition des étudiants, surtout que l’un des auteurs du présent article exerce dans la dite université.

6 La méthode « Alceste », offre l’avantage de permettre une analyse de contenus discursifs (recueillis par entretiens par exemple), sur des bases méthodologiques strictes (Abric, 2012).

7 Sciences de l’Information et de la Communication

8 Environnement Numérique de Travail

9 Dans l’approche des représentations sociales, Bataille (2000) a développé le concept de « représentations professionnelles », comme des formes spécifiques de représentations sociales élaborées en contexte professionnel.

10 https://erisk.hypotheses.org/67h

11 https://fr.unesco.org/news/eliminer-obstacles-lapprentissage-distance

12 Idem.p.27

13 Cités par Paula Berestovoy(2006) ; «  La contribution de la théorie des représentations sociales à l’étude des conflits d’usage en environnement », Journal International sur les Représentations SOciales, 3, 1, pp. 68-74..

14 L’ancrage désigne l’enracinement social de la représentation et de son objet dans un système de pensée, l’intégration cognitive de l’objet représenté dans le système de pensée préexistant…

15 La distribution des interviewés en fonction de la variable genre est quasi-identique à celle de la population-mère

16 Une faible proportion (8%) n’a pas répondu à la question

17 Soit 70%, en additionnant les % des trois opinions

18 A la question 9

19 Entre guillemets étant donné que nous n’adoptons pas cette appellation, la pédagogie, d’après nous, ne se limitant pas au simple usage de l’outil numérique, mais est basée sur d’autres paramètres, notamment le volet communicationnel, relationnel…

20 Nous nous contentons d’exposer les justifications jugées plus pertinentes et ayant trait au « lien social » assuré par l’enseignement en présentiel

21 https://www.bienenseigner.com/lenseignement-a-distance-avantages-et-inconvenients/

22 https://unsujet.com/cours-a-distance-il-ne-faut-pas-confondre-numerique-et-distanciel/

23 Idem

24 Compris comme les liens, notamment sociaux, psychologiques et pédagogiques

25 La question 11 est la suivante : A votre avis, l’enseignement à distance altère-t-il la relation enseignant-apprenant ? Justifiez votre réponse

26 Sujet 25 (noté S.25) sur les 100 enquêtés. Il s’agit d’un jeune homme (noté M)

27 Question 14 : - Pensez-vous que l’enseignement à distance permet une meilleure assimilation du cours ?

28 Q.16- L’enseignement à distance permet-il une meilleure évaluation du travail de l’apprenant ?

29 Q. 17-L’enseignement à distance assure-t-il une meilleure formation académique ? Justifiez votre réponse

30 Q.20-b- Pensez-vous que l’utilisation du numérique engendre des inégalités d’accès à l’information ? Si « Oui », pouvez-vous préciser ?

31 https://www.educavox.fr/alaune/le-role-et-la-place-de-l-enseignant-apres-trois-decennies-de-technologie-a-l-ecole

32 Dans l’enseignement synchrone à distance, les étudiants assistent en temps réel à des visioconférences selon un horaire défini. L’enseignement asynchrone permet en revanche, la diffusion de cours en différé.

Pour citer ce document

Itidel Fadhloun et Abdelkader Ben Jdira, «Comment les étudiants se représentent-ils la pédagogie numérique en temps de Covid-19 ? Quels sont les effets pervers de cette forme d’apprentissage ?», French Journal For Media Research [en ligne], Browse this journal/Dans cette revue, 18/2023 Varia - autres articles en cours de publication, Articles, mis à jour le : 11/09/2023, URL : http://www.frenchjournalformediaresearch.com/lodel-1.0/main/index.php?id=2239.

Quelques mots à propos de :  Itidel Fadhloun

Itidel Fadhloun

Docteure et chercheuse en science politique, Laboratoire Triangle, UMR 5206 du CNRS, IEP Lyon, ENS Lyon. UJM St Etienne.

Professeure à l’IAE de l’université Jean Monnet Saint Etienne. (Enseignante en sociologie du travail, en sociologie des organisations et en communication interpersonnelle).

itidel.ldh@gmail.com

Quelques mots à propos de :  Abdelkader Ben Jdira

Abdelkader Ben Jdira

Docteur et Chercheur en sciences de l’information et de la communication, rattaché à l’UR Bibliothèque numérique et patrimoine. ISD-Université La Manouba (Tunis).

Membre de l’équipe de recherche d’ITS France Technology, Roanne.

abdel.bjdr@gmail.com

 

 

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